La loi du 02 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail, dite « Loi Santé », modifie en profondeur les règles applicables en matière de prévention de la santé des salariés.

Alors que cette loi est entrée en vigueur le 31 mars 2022, différents décrets d’application viennent de paraitre et apportent des précisions attendues :

1  – Sur les visites médicales

En vue de lutter contre la désinsertion professionnelle des salariés à la suite d’une absence pour maladie ou d’un accident du travail, la loi santé organise une réforme des visites médicales.

A compter du 31 mars 2022, un rendez-vous de liaison entre le salarié et l’employeur pourra être organisé pendant un arrêt de travail consécutif à une maladie ou à un accident, qu’il soit de nature professionnelle ou non. Cet entretien aura notamment pour objet d’informer le salarié sur la possibilité de bénéficier d’actions de prévention de la désinsertion professionnelle, d’un examen de pré-reprise et de mesures d’aménagement du poste et du temps de travail. Il s’agit d’une mesure facultative organisée à l’initiative de l’employeur ou du salarié.

Le rendez-vous de liaison pourra être proposé au salarié dont l’arrêt de travail aura débuté à compter du 31 mars 2022.

Ce rendez-vous pourra être envisagé à partir de 30 jours d’arrêt de travail.

Un examen de pré-reprise pourra également être organisé dès lors que l’arrêt de travail dépasse 30 jours (au lieu de 3 mois précédemment).

S’agissant de la visite de reprise, celle-ci reste obligatoire à la suite d’un congé maternité, d’une absence pour cause de maladie professionnelle quelle qu’en soit la durée, d’une absence d’au moins 30 jours pour accident du travail. En revanche, alors qu’une visite de reprise devait être organisée dès 30 jours d’absence pour cause de maladie ou d’accident non professionnel, ce délai est porté à 60 jours d’absence à compter du 31 mars 2022.

A noter que ces règles s’appliqueront aux arrêts de travail commençant après le 31 mars 2022.

Une visite et un suivi post-exposition est créé pour les salariés ayant fait l’objet d’un suivi médical renforcé et ayant été exposé à des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité. Cette visite pourra être organisée s’agissant des expositions ayant cessé à compter du 31 mars 2022.

La visite post-exposition devra être organisée à l’initiative de l’employeur dès qu’il aura connaissance de la cessation d’exposition d’un salarié à des risques particuliers pour sa santé ou sa sécurité justifiant un suivi individuel renforcé. A défaut, le salarié pourra solliciter le bénéfice de la visite post-exposition dans le mois précédent la cessation de l’exposition et jusqu’à 6 mois après cette date.

A l’issue de la visite post-exposition, le médecin du travail remettra au salarié un état des lieux de ses expositions aux facteurs de risques professionnels et le versera au dossier médical en santé au travail. Le médecin du travail pourra décider de la mise en place d’une surveillance post-exposition s’il constate une exposition du salarié à des risques professionnels dangereux.

2 – Sur le document unique d’évaluation des risques

Alors qu’une révision annuelle du document unique d’évaluation des risques était obligatoire pour toutes les entreprises, cette obligation de mise à jour est supprimée à compter du 31 mars 2022 pour les entreprises de moins de 11 salariés. Ces entreprises devront toujours obligatoirement être dotée d’un document unique d’évaluation des risques, mais n’auront plus à le mettre à jour tous les ans. Rappelons cependant que, en application de l’article R.4121-2 du Code du travail, l’actualisation du document unique d’évaluation des risques demeure obligatoire en cas de décision d’aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, ou lorsqu’une information supplémentaire intéressant l’évaluation d’un risque est porté à la connaissance de l’employeur.

La loi santé au travail impose, par ailleurs, à tout employeur de définir des actions de prévention au regard des résultats de l’évaluation des risques, lesquelles doivent être formalisées :

  • Dans les entreprises d’au moins 50 salariés : dans le programme annuel de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail (PAPRIPACT) ;
  • Dans les entreprises de moins de 50 salariés : dans une liste consignée dans le document unique.

Le décret du 18 mars 2022 précise que la mise à jour du programme annuel de prévention ou de la liste des actions de prévention doit être effectuée concomitamment à la mise à jour du document unique d’évaluation des risques « si nécessaire ».

En application de la loi santé, le décret du 18 mars 2022 modifie la liste des personnes et instances pouvant accéder au document unique d’évaluation des risques. Ce dernier doit être tenu à la disposition à la disposition :

  • Des salariés, mais pour les seules versions en vigueur durant leur période d’activité dans l’entreprise ;
  • Des anciens salariés pour les versions en vigueur durant leur période d’activité dans l’entreprise ;
  • Du service de prévention et de santé au travail ;
  • Des élus du CSE ;
  • Des agents de l’inspection du travail ;
  • Du service de prévention des organismes de sécurité sociale ;
  • Des organismes professionnels de santé et sécurité constitués dans certaines branches d’activité ;
  • Des inspecteurs de la radioprotection.

La mise à disposition élargie du document unique d’évaluation des risques ne s’applique qu’aux versions en vigueur au 31 mars 2022 ou élaborées à compter de cette date.

Par ailleurs, rappelons que, pour permettre une traçabilité des expositions, la loi santé au travail impose à l’employeur de conserver le document unique d’évaluation des risques, dans ses versions successives, pendant une durée d’au moins 40 ans. Le décret du 18 mars 2022 fixe cette durée de conservation et de mise à disposition du document unique d’évaluation des risques à 40 ans à compter de leur élaboration.

A cet effet, le document unique qui s’est mis à jour devra fait l’objet d’un dépôt dématérialisé sur un portail numérique à compter :

  • Du 1er juillet 2023 pour les entreprises d’au moins 150 salariés ;
  • Du 30 septembre 2022 pour les entreprises de moins de 150 salariés (décret du 5 avril 2022).

A noter que jusqu’à l’entrée en vigueur de l’obligation de dématérialisation, il appartient à l’employeur de conserver les versions successives du document unique d’évaluation des risques, soit sous forme d’un document papier soit sous forme dématérialisée.

Rappelons enfin qu’en application de la loi santé, le CSE devra désormais être consulté sur le contenu du document unique d’évaluation des risques et ses mises à jour.

Sophie WATTEL, avocat spécialiste en droit du travail