Par une instruction du 05 mai 2020, le Ministère du travail a déployé un plan de contrôle a posteriori sur l’activité partielle dans le cadre de la crise du COVID19.

Cette instruction précise que : «  La mise en œuvre du nouveau dispositif d’activité partielle, l’afflux très important de demandes et l’automatisation concomitante des dispositifs de validation des demandes sont susceptibles de générer un niveau élevé d’erreurs et de fraudes. Au regard de l’importance des volumes financiers en cause, le déploiement d’un plan de contrôle a posteriori est impératif.

  • Le plan de contrôle comprend un objectif principal : la lutte contre la fraude dans le cadre juridique existant qui permet, outre la régularisation amiable des demandes, les retraits de décisions administratives, les sanctions administratives et pénales liées à la constatation d’une fraude. A titre subsidiaire, le plan de contrôle pourra également permettre la régularisation de demandes d’indemnisation mal renseignées.».

L’instruction indique les entreprises cibles du plan de contrôle :

  • Entreprises ayant présenté les demandes d’indemnisation sur la base de taux horaires élevés ;
  • Secteurs fortement consommateurs d’activité partielle notamment le BTP, les services administratifs de soutien et de conseils aux entreprises ;
  • D’une façon générale, les entreprises dont l’effectif est composé d’une majorité de cadres dont l’activité est davantage susceptible d’être exercée en télétravail.

L’instruction du Ministère du travail a été complétée par une instruction du 14 mai 2020 de la DGEFP (Direction Générale à l’Emploi et à la Formation Professionnelle) et de la DGC (Direction Générale du Travail) qui dresse une typologie des fraudes à l’activité partielle qui ont pu être commises par les entreprises, à savoir :

  • Salariés fictifs : l’employeur déclare en activité partielle un salarié fictif ou embauche un salarié et le place immédiatement en activité partielle avec un salaire important et rompt le contrat avant la fin de la période d’essai.
  • Travail dissimulé : le salarié a continué de travailler pendant ses heures d’activité partielle, notamment en télétravail.
  • Cumul congés ou arrêt maladie et activité partielle : le salarié est en congé ou en arrêt maladie et perçoit ses indemnités pendant la période d’activité partielle.
  • Recours à la sous-traitance ou à l’intérim : l’employeur place des salariés en activité partielle et utilise la sous-traitance ou l’intérim ou la prestation de services internationale pour prendre temporairement en charge l’activité normalement réalisée par les salariés.
  • Nombre d’heures d’activité partielle déclarée : l’employeur déclare plus d’heures en activité partielle que les heures effectivement chômées, y compris le cas des salariés au forfait avec risque de gonflement des heures.
  • Gonflement des salaires : l’employeur déclare des taux horaires supérieurs au réel.
  • Production de faux : contrôle de la réalité de l’allocation reversée au salarié par l’employeur.

La DGEFP, la DGT et le Ministère du travail insistent sur le fait que ne doivent pas être confondues les fraudes ainsi recensées avec de simples erreurs d’application du dispositif qui doivent pouvoir être régularisées dans le cadre de l’exercice du droit à l’erreur.

Aux fins d’identifier les fraudes susvisées, trois types de contrôle pourront être menés :

  • Détection et croisement de données administratives ;
  • Contrôle sur pièces ;
  • Contrôle sur place permettant notamment d’interroger directement le chef d’entreprise, les représentants du personnel et les salariés.

L’instruction du 14 mai rappelle les sanctions encourues en cas de fraude avérée à l’activité partielle. Sur le plan pénal, une peine de deux ans d’emprisonnement ainsi qu’une peine d’amende de 30.000 euros sont encourues. Il convient de rappeler que le montant de l’amende est quintuplé pour les personnes morales, soit une peine encourue de 150.000 euros.

Sur le plan administratif, l’employeur encourt les sanctions prévues en cas de travail illégal, à savoir : exclusion d’une durée maximale de 5 ans à l’accès de certaines aides publiques, remboursement des aides accordées durant les 12 mois précédents, etc. Un retrait de l’autorisation d’activité partielle pourrait également être ordonné si l’autorisation a été accordée par erreur et que la décision d’autorisation est illégale. Ce retrait impliquera pour l’employeur le remboursement des sommes perçues à ce titre.

Conseil : outre les cas de fraude avérée (salarié fictif, cumul congés ou arrêt maladie et activité partielle, gonflement des salaires, etc.) il est important pour chaque employeur ayant eu recours à l’activité partielle de conserver l’intégralité des éléments justificatifs relatifs tant au recours à l’activité partielle : éléments justifiant de la baisse d’activité (éléments comptables, courriers de clients sollicitant un report des contrats en cours, etc.) ainsi que des modalités de travail mises en œuvre et de la répartition des heures travaillées, télétravaillées et non travaillées au titre de l’activité partielle (plannings, documents récapitulatifs hebdomadaires ou mensuels signés par le salarié et son supérieur hiérarchique, procès-verbal de réunion du CSE, etc.). A défaut de pouvoir justifier tant de la réalité du motif de recours que du nombre d’heures déclarées au titre de l’activité partielle, l’employeur encourt les sanctions susvisées.

Me Sophie WATTEL, avocat spécialiste en droit du travail