En application de l’article L442-6, I, 5° du Code de commerce, tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers engage sa responsabilité si elle rompt brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, en l’absence d’un préavis écrit qui tienne compte notamment de la durée de la relation commerciale, en référence aux usages du commerce ou aux accords interprofessionnels.

Par une décision du 28 juin 2023 (Cass. Com, 28.06.2023, n°21-16.940), la Cour de cassation considère qu’un syndicat de copropriétaires dont les membres sont des commerçants d’un centre commercial entre dans le champ d’application de l’article L442-6, I, 5° du Code de commerce. A ce titre, elle le juge responsable de la rupture brutale (préavis d’un mois au lieu de quatre mois) du contrat de prestations de services de sécurité incendie et de surveillance du site le liant au prestataire.

La Cour de cassation justifie la réparation du prestataire en combinant l’article L442-6 avec l’article L410-1 du Code de commerce qui prévoit que les dispositions susvisées s’appliquent à toutes les activités de production, de distribution et de services, de sorte que, bien qu’un syndicat ait une nature civile, la relation liant le syndicat et le prestataire était commerciale puisque le contrat conclu avec le prestataire avait pour objet d’assurer une prestation de service pour les besoins de l’activité commerciale de ses membres,

Depuis l’ordonnance 2021-649 du 26 mai 2021, l’article L442-6, I, 5° est devenu l’article L442-1, II du Code de commerce qui vise désormais, expressément l’interdiction de la rupture brutale des relations commerciales établies pour « toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services ». Ainsi, cette solution de la Cour de cassation devrait être transposable aux nouvelles dispositions.

La Cour de cassation rappelle, en outre, sa jurisprudence au titre de laquelle le « préjudice principal résultant du caractère brutal de la rupture s’évalue en considération de la marge brute escomptée, c’est-à-dire la différence entre le chiffre d’affaires hors taxe escompté et les coûts variables hors taxe non supportés durant la période d’insuffisance de préavis ». En conséquence, elle juge que l’assiette de l’indemnisation de la rupture brutale de cette relation commerciale ne pouvait comprendre l’équivalent du chiffre d’affaires qui aurait été réalisé pendant ces quatre mois comme le souhaitait le prestataire.

Conseil : la rupture d’un contrat, ou plus largement d’une relation commerciale établie (même en l’absence de contrat écrit), est une opération délicate qu’il convient d’aborder avec prudence compte tenu des multiples paramètres à prendre en compte : durée de la relation, qualification de la relation, articulation avec la clause résolutoire, faute d’une des parties, obligation de notification écrite, etc.

Me Jean-Pascal CHAZAL, avocat spécialiste en droit commercial
Me Clémence LARGERON, avocat en droit commercial