Dans une récente décision, la Chambre commerciale de la Cour de Cassation a eu à connaître d’un litige où une société a remboursé à son associée unique la somme de 44 000 euros au titre de son compte courant d’associé. Un jugement a par la suite condamné la société à payer à son bailleur une somme supérieure à 40 000 euros au titre d’un arriéré de loyers. La société avait dès lors été placée en liquidation judiciaire quelques mois plus tard.

Soutenant que le remboursement du compte courant était intervenu, quelques mois auparavant, en fraude des droits des créanciers, le liquidateur avait alors assigné en justice l’associée unique sur le fondement de l’action paulienne, et obtenu de voir déclaré ce remboursement inopposable à la liquidation judiciaire et de voir l’associée unique condamnée à restituer la somme de 44 000 euros.

La Chambre commerciale de la Cour de cassation a finalement cassée cette décision des juges du fonds, en rappelant que l’action paulienne est subordonnée non seulement à la preuve de ce que le débiteur a conscience du préjudice causé à un créancier par le remboursement contesté, mais également au fait que ce dernier constitue un acte d’appauvrissement créant l’insolvabilité, au moins apparente, de la société. Elle rappelle également que le compte courant d’associé constitue un prêt consenti par l’associé à la société dont la caractéristique essentielle est d’être, sauf disposition de blocage conventionnelle ou statutaire, remboursable à tout moment. Il en résulte que le remboursement de ce compte courant n’est pas attaquable par la voie d’une action paulienne (car ne constituant pas un acte d’appauvrissement de la société), sauf bien sûr s’il a été opéré en violation d’une convention de blocage ou des statuts de la société ou sous la forme d’un paiement effectué par des moyens inhabituels.

(Cass, com. 15/05/2019 n°18-10.403)

Me Emmanuel MAITRE, avocat spécialiste en droit des Sociétés

Me Serge VICENTE, avocat

Me Simon POLGE, avocat