En matière de droit de la consommation, l’article L. 212-1 et suivants du Code de la consommation répute non écrites les clauses qualifiées d’abusives. Cette sanction doit se distinguer des demandes tendant à obtenir la nullité de la clause. Si plusieurs différences entre les deux actions existent, la distinction reste néanmoins floue, et se pose donc la question de savoir si les deux notions suivent un régime similaire en matière de prescription. L’action en nullité se prescrivant par 5 ans, la Cour de cassation a eu à s’interroger sur la prescription de l’action tendant à faire constater le caractère abusif d’une clause et donc à la voir réputer non écrite.
Par une décision du 30 mars 2022 (Civ. 1re, 30 mars 2022, FS-B, n° 19-17.996), la Cour de cassation est venue consacrer, s’agissant des contrats de consommation, le caractère imprescriptible d’une telle demande en rappelant les termes d’une décision de la CJUE du 10 juin 2021 (C-776/19 à C-782/19), qui a considéré que « l’article 6, § 1, et l’article 7, § 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, lus à la lumière du principe d’effectivité, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une règlementation nationale soumettant l’introduction d’une demande par un consommateur aux fins de la constatation du caractère abusif d’une clause figurant dans un contrat conclu entre un professionnel et ce consommateur à un délai de prescription ».
Elle en déduit ainsi que la demande tendant à voir réputer non écrite une clause abusive sur le fondement de l’article L. 212-1 (ancien L. 132-1) du Code de la consommation n’est pas soumise à la prescription quinquennale.
A noter que la Cour de cassation, dans une décision du 13 mars 2019 (Civ. 1re, 13 mars 2019, n° 17-23.169) avait déjà considéré que la demande tendant à voir réputer non écrites les clauses litigieuses ne s’analysait pas en une demande en nullité et n’était donc pas soumise à la prescription quinquennale.
La question se pose de savoir si la Cour de cassation appliquera, de manière identique, l’imprescriptibilité de l’action visant à voir réputer non écrite une clause ayant un caractère abusif pour l’article 1171 du Code civil qui sanctionne, en droit commun, les clauses abusives dans des termes similaires à ceux de l’article L212-1 du Code de la consommation mais en l’absence de règlement européen encadrant lesdites clauses abusives.
Maître Jean-Pascal CHAZAL, avocat spécialiste en Droit commercial
et Clémence LARGERON, élève avocat