L’arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 18 novembre 2020 revient sur le régime juridique d’une clause d’exclusivité territoriale insérée dans un contrat de distribution (Cass. com., 18 nov. 2020, n°19-14.828).

La clause d’exclusivité territoriale présente un véritable avantage pour le distributeur, qui peut commercialiser un produit donné sur un territoire défini sans que le même produit ne puisse être commercialisé par un tiers sur ce même territoire.

Toutefois, l’insertion d’une telle clause doit être réalisée de manière prudente, sans quoi, elle pourrait tomber sous le coup du droit de la concurrence, certaines exclusivités concédées pouvant s’apparenter à une entente au sens de l’article L. 420-1 du Code de commerce et de l’article 101 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

Pour être sanctionnée, l’entente doit avoir pour effet ou pour objet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché pertinent.

C’est pourquoi, il est nécessaire de se poser la question de la validité d’une clause d’exclusivité territoriale lors de la conclusion de chaque contrat. Si certaines exemptions existent en droit européen et ont pour conséquence d’exclure la qualification d’entente pour certaines pratiques, le droit français pose certaines conditions pour que de telles exclusivités soient valables. Par exemple, l’Autorité de la concurrence a déjà estimé qu’il fallait apprécier la validité d’une clause d’exclusivité au regard du champ d’application de l’exclusivité, de sa durée, de l’existence d’une justification technique, ainsi que de la contrepartie économique obtenue par le client (Autorité de la concurrence, 25 avr. 2007, n°07-MC-01).

La question qui était notamment posée dans l’arrêt du 18 novembre 2020 était relative à la preuve de la validité de la clause d’exclusivité.

La Cour d’appel avait jugé que le fournisseur ne démontrait pas que les pratiques en cause étaient susceptibles d’affecter le jeu de la concurrence, et que l’allégation selon laquelle le chiffre d’affaire réalisé par le distributeur était bas contredisait la présomption d’affectation du commerce entre Etats membres.

La Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel en considérant qu’il appartenait au distributeur de démontrer l’absence de pratique anticoncurrentielle dans la mesure où la Cour d’appel avait relevé une présomption d’affectation du commerce entre les Etats membres dans la mesure où la clause d’exclusivité s’étendait à l’ensemble du territoire national.

En conclusion, il est important de bien comprendre l’enjeu à insérer une clause d’exclusivité territoriale et de s’assurer de sa validité car elle est soumise à une présomption d’illicéité. Le distributeur, sur lesquels pèse la charge de la preuve, doit s’il veut invoquer cette clause se préconstituer la preuve de sa licéité.

Maître Jean-Pascal CHAZAL, avocat spécialiste en Droit commercial
Marine COMTE Master droit de la propriété intellectuelle et des nouvelles technologies