Selon les articles L.622-24 et R.622-24 du Code de commerce, à partir de la publication du jugement d’ouverture d’une procédure collective, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement à ce jugement, doivent adresser la déclaration de leur créance au mandataire judiciaire dans un délai de deux mois.

La question s’est posée de savoir si la déclaration de créance devait être faite au mandataire judiciaire, personne physique, ou, dans le cas où celui-ci est associé au sein d’une société d’exercice libéral, à cette société.

Dans un arrêt rendu le 03 juillet 2024 la Cour de cassation apporte une réponse.

Pour ce faire, elle revient sur les règles en matière de désignation du mandataire judiciaire.

L’article R.814-83 du Code de commerce dispose que lorsque le tribunal nomme une société, il désigne en son sein un ou plusieurs associés exerçant l’activité de mandataire judiciaire pour la représenter dans l’accomplissement du mandat qui lui était confié. Avant le décret n°2017-796 du 05 mai 2017, l’article disposait que le mandat était exercé par la société de mandataire judiciaire et que le juge désignait celui ou ceux des associés qui conduirait la mission au sein de la société en son nom. C’est sur le fondement de cet ancien article que la Cour de cassation a prononcé sa décision.

Par ailleurs, les articles R.814-84 et R.814-85 du Code de commerce disposent que le mandataire judiciaire associé exerçant au sein d’une société ne peut exercer sa profession à titre individuel ou en qualité de membre d’une autre société, quelle qu’en soit sa forme. Il exerce les fonctions de mandataire judiciaire au nom de la société.

Sur la base de ces dispositions, la Cour de cassation juge que lorsqu’un mandataire judiciaire exerce ses fonctions au sein d’une société d’exercice libéral, la déclaration de créance qui est faite par un créancier est régulière, même lorsqu’elle est adressée au nom du mandataire judiciaire, personne physique, et non au nom de la société. Il en est de même lorsque cette déclaration de créance n’est pas adressée au siège de la société, mais à l’un de ses bureaux annexes (Cass. Com. 03/07/2024, n° 23-10.067, P).

Aussi, et quand bien même la publication au BODACC mentionne la société d’exercice libéral au sein de laquelle le mandataire judiciaire exerce son activité en qualité de mandataire, cela n’empêche pas le créancier de déclarer sa créance au nom du mandataire judiciaire, personne physique. Il s’agit toutefois d’un palliatif, et il est toujours plus sécuriser d’adresser la déclaration de créance à la société désignée en qualité de mandataire judiciaire.

Conseil : Il convient d’être vigilent sur la personne qui est destinataire de la déclaration de créance ainsi que l’adresse à laquelle elle est envoyée. En aucun cas cette déclaration de créance ne peut être envoyée au débiteur, ou à l’administrateur judiciaire. Il faut l’adresser au nom du mandataire judiciaire et à son siège (ou bureaux secondaires).

Jean-Pascal CHAZAL, Avocat spécialiste en Droit commercial, des affaires et de la concurrence
Marine COMTE, Avocat en droit commercial