La société qui recourt massivement au travail temporaire pour pourvoir durablement des employés à son activité normale et permanente se rend coupable, d’une part, du délit de recours abusif au travail temporaire et, d’autre part, de délit d’entrave si elle cesse de recourir au travail temporaire sans avoir préalablement informé et consulté le comité d’entreprise (Soc. 10/05/2016).

Dans un arrêt du 10 mai 2016, la chambre criminelle de la Cour de Cassation approuve une cour d’appel ayant condamné un employeur pour recours abusif au travail temporaire.

En effet, il résulte des dispositions des articles L. 1251-5 et L. 1251-6, 1° et 2°, du Code du travail qu’il ne peut être fait appel aux salariés d’une entreprise de travail temporaire que pour des tâches non durables en cas de remplacement de salariés absents ou d’accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise utilisatrice, et non pour pourvoir durablement, comme en l’espèce, des emplois liés à l’activité normale et permanente de cette entreprise.

Le fait de conclure un contrat de travail temporaire ayant pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’acte est normale et permanente de l’entreprise est puni d’une amende de 3750 €. La récidive est punie d’un emprisonnement de 6 mois et d’une amende de 7500 €.

En outre, les salariés concernés sont en droit de solliciter la requalification de leur contrat en contrat de travail à durée indéterminée. Aussi, si leur contrat a été rompu sans que les règles relatives à la rupture du contrat à durée indéterminée aient été respectées, ceux-ci sont en droit de saisir la juridiction prud’homale afin d’obtenir une indemnisation.

Par ailleurs, la chambre criminelle de la Cour de Cassation rappelle que, conformément à l’article L.2323-1 du Code du travail, le comité d’entreprise doit être informé et consulté sur les mesures de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs.

Or, en l’espèce, en raison de leur caractère abusif, des contrats de travail temporaire devaient être considérés comme des contrats de travail à durée indéterminée faisant parti des effectifs de l’employeur. Par conséquent, la décision d’arrêter de recourir à l’intérim devait être, en l’espèce, précédée d’une consultation du comité d’entreprise.

Conseil : limiter le recours au travail temporaire aux cas autorisés par la loi et penser à consulter le CE dès lors qu’une décision est de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs.

Maître Sophie WATTEL