Il est constant que le principe d’égalité de traitement s’applique aux conventions et accords collectifs.

Cependant, dans la mesure où elles sont opérées par voie de conventions négociées et signées par des organisations syndicales représentatives, la Cour de cassation en avait déduit que certaines catégories de différence de traitement étaient présumées justifiées de sorte qu’il appartenait au salarié qui les contestait de démontrer qu’elles étaient étrangères à toute considération professionnelle. Ainsi, sont présumées justifiées, les différences de traitement organisées par une convention ou un accord collectif :

  • Entre catégories professionnelles ;
  • Entre salariés exerçant au sein d’une même catégorie professionnelle des fonctions distinctes ;
  • Entre salariés appartenant à la même entreprise mais à des établissements distincts.

Dans un arrêt du 03 avril 2019 bénéficiant d’une très large publicité (sites internet, bulletin de la Cour de cassation, rapport annuel de la Cour de cassation), la Cour de cassation vient préciser que cette présomption de justification n’est pas générale et se trouve notamment limitée dans les domaines où est mis en œuvre le droit de l’Union européenne. Dans ces domaines, une telle présomption se trouve privée d’effet dans la mesure où les règles propres au droit de l’Union doivent s’appliquer, ce qui interdit donc la généralisation d’une présomption de justification de toute différence de traitement.

Dans le cas d’espèce, la Cour de cassation considère qu’un accord collectif opérant une différence de traitement entre des salariés en raison uniquement de leur date d’arrivée sur un site, alors que les salariés sont placés dans une situation exactement identique au regard des avantages objets de l’accord, organise une différence de traitement injustifiée.

S’agissant des différences de traitement autres que celles listées plus haut, les règles de preuve du droit de l’Union européenne doivent s’appliquer, lesquelles prévoient que « lorsqu’un employé fait valoir que ce principe – principe d’égalité de traitement – a été violé et établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, il incombe à la partie défenderesse – donc à l’employeur – de prouver qu’il n’y a pas eu de violation du principe ».

Il convient donc de se montrer vigilant lorsque des différences de traitement sont organisées par conventions collectives de branche mais également par accord d’entreprise. Ces différences doivent être justifiées par des différences de situation objectives dont l’employeur doit se préconstituer la preuve.

Sophie WATTEL,  spécialiste en droit du travail