Lorsqu’un salarié est déclaré inapte par le médecin du travail, la recherche d’un poste de reclassement s’impose à l’employeur préalablement à tout licenciement sauf exceptions prévues par la loi telle que la mention dans un avis d’inaptitude professionnelle « que tout maintien du salarié dans l’entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé », exception étendue à l’inaptitude non professionnelle par la loi TRAVAIL du 8 août 2016.

Jusqu’à présent, si certaines possibilités de reclassement avaient été négligées par l’employeur eu égard à la position du salarié s’agissant des propositions de reclassement, l’employeur était considéré comme n’ayant pas rempli ses obligations en matière de reclassement (Soc. 30 nov. 2010, n° 09-66687 ; Soc. 6 mai 2015 n° 13-27349).

Or, par deux arrêts en date du 23 novembre 2016, la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence (Soc. 23 nov. 2016, n° 15-18092 FSPBRI ; Soc. 23 nov. 2016, n° 14-26398 PBRI).

En effet, il ressort de ces deux arrêts que l’employeur peut, désormais, tenir compte des critères exprimés par le salarié pour limiter le périmètre de son obligation de reclassement.

Ces arrêts paraissent fixer une position de principe de la Cour de cassation compte tenu de leur large diffusion et notamment de leur publication au rapport annuel de la Cour.

Néanmoins, il conviendra de suivre les précisions qu’apportera la Cour quant à l’application de cette solution. En effet, dans les deux espèces, il était question du critère géographique. On peut se demander si d’autres critères et notamment des critères liés au poste ou aux fonctions occupées par le salarié pourraient être pris en compte de la même manière par l’employeur, pour limiter ses recherches de reclassement.

Conseil : en matière de reclassement, suite à la déclaration d’inaptitude d’un salarié, c’est à l’employeur qu’il incombe d’établir qu’il a mis en œuvre tous les moyens pertinents pour remplir son obligation de reclassement (Soc. 6 janv. 2010, n° 08-44177). A défaut, le licenciement subséquent pourrait être requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse et le salarié prétendre aux indemnités afférentes. Il est donc impératif que l’employeur se préconstitue la preuve du respect de son obligation de reclassement. Jusqu’à aujourd’hui cela impliquait de conserver la preuve des propositions de reclassement adressées au salarié. Compte tenu de ce revirement de jurisprudence, il devient également capital de conserver la preuve des refus ou remarques exprimés par le salarié et que l’employeur entend prendre en considération pour limiter l’étendue de son obligation de reclassement. Aussi, nous vous conseillons de veiller à ce que ces échanges soient constatés par écrit et à en conserver la preuve en vue d’un éventuel litige.

Sophie WATTEL et Zaïra APACHEVA