La loi pour renforcer la prévention en santé au travail a été définitivement adoptée en juillet 2021 et publiée au Journal Officiel le 03 août 2021. Elle rentrera en vigueur pour l’essentiel le 31 mars 2022 et s’articule principalement autour de quatre axes :

1. Evaluation et prévention des risques professionnels

La loi santé au travail place le document unique d’évaluation au cœur de la prévention des risques professionnels.

A toute fin utile, il est rappelé que tout employeur est tenu d’élaborer un document unique d’évaluation des risques dès l’embauche du premier salarié.

Outre l’identification de l’ensemble des risques professionnels auxquels les salariés sont exposés, le document unique d’évaluation des risques devra désormais assurer la traçabilité collective de ces expositions. Aussi, l’employeur devra désormais conserver le document unique d’évaluation des risques, dans ses versions successives, pendant une durée d’au moins quarante ans. Les modalités de cette conservation seront fixées par décret. Durant cette durée, le document unique d’évaluation des risques devra être tenu à la disposition des travailleurs, des anciens travailleurs ainsi que de toute personne ou instance pouvant justifier d’un intérêt à y avoir accès.

L’employeur devra désormais transmettre le document unique d’évaluation des risques à chaque mise à jour au service de prévention et de santé au travail.

Le document unique d’évaluation des risques fera désormais l’objet d’un dépôt dématérialisé sur un portail numérique afin de garantir la pérennité de sa conservation et de sa mise à disposition sur la durée susvisée. Cette obligation de dépôt dématérialisé sera applicable au 1er janvier 2023 pour les entreprises d’au moins 150 salariés, puis à compter de dates fixées par décret pour les entreprises de moins de 150 salariés.

Par ailleurs, la loi impose à tout employeur de définir des actions de prévention au regard des résultats de l’évaluation des risques, lesquelles sont, selon l’effectif de l’entreprise, ou bien formalisées dans un plan annuel de prévention (entreprises d’au moins 50 salariés), ou bien consignées dans le document unique d’évaluation des risques (entreprises de moins de 50 salariés). Le plan annuel de prévention doit comprendre la liste détaillée des mesures devant être prises au cours de l’année à venir, l’identification des ressources de l’entreprise pouvant être mobilisées ainsi qu’un calendrier de mise en œuvre. Pour les entreprises de moins de 50 salariés, le document unique d’évaluation des risques doit définir les actions de prévention des risques et de protection des salariés.

Il est également à noter que, à compter de l’entrée en vigueur de la loi, le Comité Social et Economique (CSE) devra être associé à l’évaluation des risques. Le CSE devra notamment être consulté sur le document unique d’évaluation des risques et ses mises à jour.

Par ailleurs, la loi crée un « passeport de prévention », que doit renseigner l’employeur, destiné à rassembler l’ensemble des attestations, certificats et diplômes obtenus par le salarié à l’occasion de formations relatives à la santé et à la sécurité au travail.

Enfin, le sujet de la qualité des conditions de travail est intégré à la négociation obligatoire sur l’égalité professionnelle et la qualité de vie au travail (concernant les entreprises où sont constituées une ou plusieurs sections syndicales d’organisations représentatives).

2. Suivi médical et lutte contre la désinsertion professionnelle

La loi santé au travail crée un « rendez-vous de liaison » entre le salarié et l’employeur auquel le service de prévention et de santé au travail est associé pour les arrêts de travail de longue durée dont la définition devra être fixée par décret. L’idée est de permettre aux parties d’échanger avant la reprise du travail, d’informer le salarié qu’il peut bénéficier d’actions de prévention de la désinsertion professionnelle, d’un examen de pré-reprise et de mesures d’aménagement du poste et du temps de travail le cas échéant.

La loi santé au travail instaure également une visite médicale de mi-carrière réalisée par le médecin du travail durant l’année civile des 45 ans. Elle a pour objet d’établir un état de lieux de l’adéquation entre le poste de travail et l’état de santé du salarié, d’évaluer les risques de désinsertion professionnelle et de sensibiliser le salarié aux enjeux du vieillissement au travail et à la prévention des risques professionnels. A son issue, le médecin du travail peut proposer par écrit et après échange avec le salarié et l’employeur, des mesures d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail, ainsi que des mesures d’aménagement du temps de travail.

Il est à noter que la loi prévoit également la modification des règles relatives aux visites de reprise et de pré-reprise qui devraient être fixées dans un décret à paraitre.

3. Amélioration de la formation à la santé et à la sécurité au travail

La loi santé au travail institue une obligation de formation en santé, sécurité et conditions de travail de tous les élus du CSE, quelle que soit la taille de l’entreprise, d’une durée minimale de cinq jours lors du premier mandat et de trois jours en cas de renouvellement, sauf pour les membres de la commission santé, sécurité et conditions de travail des entreprises d’au moins 300 salariés, auquel cas la formation lors du renouvellement devra également être de cinq jours.

Cette formation pourra être financée par les opco dans les entreprises de moins de 50 salariés, cette formation étant à la charge de l’employeur dans les entreprises de 50 salariés et plus.

La loi rend également obligatoire la formation du salarié désigné par l’employeur comme référent en santé et sécurité.

4. Réorganisation des services de santé au travail

Les services de santé au travail changent de nom et deviennent les services de prévention et de santé au travail.

Leurs missions sont complétées et vont notamment comprendre l’aide aux entreprises dans l’évaluation et la prévention des risques professionnels, l’accompagnement des employeurs et des salariés et de leur représentant dans l’analyse de l’impact des changements organisationnels importants dans l’entreprise sur les conditions de travail et de sécurité des salariés, ainsi que des actions de promotion de la santé sur le lieu de travail, de sensibilisation aux bénéfices de la pratique du sport et d’information et sensibilisation aux situations de handicap au travail.

Par ailleurs, la loi crée une cellule de prévention de la désinsertion professionnelle au sein des services de prévention et de santé au travail et autorise le recours aux téléconsultations pour assurer le suivi individuel des salariés.

Sophie WATTEL
Avocat spécialiste en droit du travail