La Cour de cassation a récemment eu l’occasion de revenir sur les conditions d’application du régime de la rupture brutale des relations commerciales établies (Cass. com., 16/02/2022, n°20-18.844).
Dans le cadre d’une relation commerciale établie, l’article L.442-1 du Code de commerce prévoit qu’engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services de rompre brutalement, même partiellement, ladite relation commerciale, en l’absence d’un préavis écrit qui tienne compte notamment de la durée de la relation commerciale, en référence aux usages du commerce ou aux accords interprofessionnels. Cette rédaction résulte d’une réforme de 2019 complétée depuis par plusieurs autres réformes successives.
Des exceptions au respect d’un préavis raisonnable sont prévues, notamment si l’autre partie n’a pas exécuté ses obligations ou en cas de force majeure.
L’arrêt commenté rappel les conditions d’application de ce régime, conditions que les juges du fond se doivent d’en vérifier le respect. Ainsi :
- La durée de la relation commerciale est calculée indépendamment de la durée des contrats conclus entre les parties. En conséquence, si la relation commerciale a débuté avant la conclusion d’un contrat, il faut prendre en compte la durée réelle de la relation ;
- Si l’inexécution des obligations d’une partie peut justifier une rupture de la relation commerciale établie sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale en cause, les fautes invoquées doivent être d’une gravité suffisante ;
- La rupture brutale peut n’être que partielle. Elle est notamment partielle si la partie qui s’en prétend victime a vu son chiffre d’affaires réalisé avec l’auteur de la rupture significativement baisser, même dans l’hypothèse où des contrats postérieurs ont été signés entre les parties.
Cet arrêt a certes été rendu sur le fondement des dispositions du Code de commerce dans leur version applicable au 16 mai 2001 (antérieure à la réforme de 2019 susmentionnée), mais les principes qu’il rappelle sont toujours applicables sous les dispositions en vigueur à ce jour.
Conseil : lorsqu’une relation commerciale est établie depuis plusieurs années, il est nécessaire de respecter un préavis raisonnable tenant compte de la durée réelle de la relation (indépendamment des contrats) pour pouvoir y mettre fin, soit totalement soit partiellement. Si c’est une inexécution contractuelle de l’autre partie qui justifie la rupture, il faudra caractériser sa gravité.
Me Jean-Pascal CHAZAL, avocat spécialiste en droit commercial
Clémence LARGERON, élève-avocat
Marine COMTE, élève-avocat