La rupture conventionnelle collective permet d’organiser, par la négociation d’un accord collectif validé par l’administration, des suppressions d’emploi, en dehors de tout licenciement pour motif économique, et donc sans avoir à justifier d’un motif économique.
Par un arrêt du 20 octobre 2021 (N° 21VE02220), la Cour Administrative d’Appel de Versailles a annulé la rupture conventionnelle collective conclue entre un employeur et 33 salariés. La Cour d’appel considère que la rupture conventionnelle collective ayant été négociée après que la fermeture du site concerné ait été décidée par l’employeur – comme cela était établi par la note d’information communiquée au CSE – les 33 salariés concernés n’avaient pas été mis en mesure de faire un réel choix entre le départ volontaire et le maintien dans leur emploi.
Cette décision est fondée sur l’article L. 1237-19 du Code du travail qui prévoit que la rupture conventionnelle collective exclut tout licenciement pour atteindre les objectifs qui lui sont assignés en termes de suppression d’emplois. Il appartenait à la DIRECCT chargée de contrôler l’accord de rupture conventionnelle collective de vérifier que celle-ci excluait bien tout licenciement, ce qui n’a manifestement pas été fait selon la Cour Administrative d’Appel.
Ce faisant, la Cour Administrative d’Appel de Versailles fait sienne la position prise par l’administration dans un questions-réponses du Ministère du Travail du 17 avril 2018 ayant considéré que la rupture conventionnelle collective ne doit pas être proposée dans un contexte de difficultés économiques aboutissant de manière certaine à une fermeture du site qui aurait pour effet de fausser le caractère volontaire de l’adhésion au dispositif et de ne pas permettre le maintien dans l’emploi des salariés non candidats à un départ.
Il convient toutefois de rappeler que ce questions-réponses est dépourvu de toute valeur normative, et qu’il sera intéressant, si un pourvoi est interjeté, de connaitre la position de la Chambre sociale de la Cour de cassation sur cette question. Dans l’attente, il convient de se montrer particulièrement prudent s’agissant de la négociation d’une rupture conventionnelle collective dans un contexte de fermeture de site, le refus de ladite rupture conventionnelle dans un tel contexte pouvant laisser comme seule alternative le licenciement pour motif économique ce qui est contraire à l’article L. 1237-19 du Code du travail.
Sophie WATTEL
Avocat spécialiste en droit du travail