Le Code civil prévoit une garantie contre les vices cachés dans les contrats de vente. En effet, et selon l’article 1641 du Code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropres à son usage auquel on la destine, ou qui diminue tellement cet usage, que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus. Par ailleurs, et selon l’article 1642 du même Code, le vendeur n’est pas tenu des vices apparents et dont l’acheteur a pu se convaincre lui-même.

Pour pouvoir agir en garantie contre les vices cachés, encore faut-il que l’acquéreur n’ait pas eu connaissance du vice lors de la vente : seuls les vices cachés sont garantis, à l’exception des vices apparents.

En cas de ventes successives, la garantie contre les vices cachés dont bénéficie le premier acquéreur à l’égard du vendeur d’origine se transmet aux acquéreurs successifs.

La Cour de cassation a récemment été interrogée sur la question de savoir à quelle date s’appréciait la connaissance du vice.

Dans les faits ayant donné lieu à l’arrêt, une société de leasing avait acquis un véhicule auprès d’un vendeur, qu’elle avait remis à une société en exécution d’un contrat de crédit-bail avec option finale d’achat. Des désordres ont été constatés sur le véhicule. Dans un rapport en date du 26 juin 2019, un expert judiciaire conclu qu’une panne était due à un défaut de conception d’une pièce d’origine.

Le 06 septembre 2019, alors que l’expert judiciaire avait déjà rendu son rapport, la société locataire a levé l’option d’achat du véhicule. Elle avait donc connaissance, lors de l’acquisition du véhicule, du vice.

Elle a néanmoins agi par la suite contre le vendeur d’origine du véhicule (ainsi que la société exploitant la marque du véhicule), en garantie des vices cachés.

La Cour de cassation a considéré qu’en cas de ventes successives, lorsqu’une action en garantie des vices cachés était exercée à l’encontre du vendeur d’origine par un sous-acquéreur, à raison d’un vice antérieur à la première vente, la connaissance de ce vice s’appréciait à la date de cette vente dans la personne du premier acquéreur.

Ainsi, la connaissance qu’a le sous-acquéreur du vice de la chose lors de sa propre acquisition est indifférente pour apprécier le bienfondé de son action contre le vendeur originaire (Cass. Com. 16/10/2024, n° 23-13.318).

Ainsi, quand bien même un sous-acquéreur aurait connaissance du vice lors de l’achat d’un bien, il pourrait agir à l’encontre du vendeur d’origine au titre de la garantie des vices cachés dans l’hypothèse où le premier acquéreur n’aurait pas eu, au moment de son propre achat, connaissance de ce vice.

Cet arrêt est étonnant et peut paraitre injuste, dans la mesure où il permet à un sous-acquéreur d’agir contre un vendeur d’origine au titre de garantie contre les vices cachés, alors même qu’il a acquis la chose en ayant connaissance dudit vice.

Jean-Pascal CHAZAL, avocat spécialiste en Droit commercial, des affaires et de la concurrence
Marine COMTE, avocat en droit commercial